Vassily Kandinsky : musicien de la peinture

Il assimile la couleur noire de l’arc à la ponctuation musicale :
« comme un rien sans possibilité, comme un rien mort après la mort du soleil, comme un silence éternel, sans avenir, sans l’espérance même d’un avenir, résonne intérieurement le noir. En musique, ce qui y correspond, c’est la pause qui marque une fin complète, qui sera suivie ensuite d’autre chose peut-être comme la naissance d’un autre monde. Car tout ce qui est suspendu par ce silence est fini pour toujours : le cercle est fermé ».

Musicien lui-même, doué de synesthésie, ce don très particulier qui permet d’entendre les couleurs ou de voir les sons, il écrit encore :

« Pensez à la part musicale que prendra désormais la couleur dans la peinture moderne. La couleur qui est vibration de même que la musique est à même d’atteindre ce qu’il y a de plus général et partant de plus vague dans la nature : sa force intérieure. »

Il poursuit :

« La couleur est le clavier. L’œil est le marteau. L’âme est le piano, avec ces nombreuses cordes. L’artiste est la main qui fait résolument vibrer l’âme au moyen de telle ou telle touche. »
« Le bleu céleste avait les sons graves d’un orgue, l’orange sonnait comme l’alto, le rouge résonnait comme un tuba, le triangle avait la sonorité épique d’une trompette ainsi que le jaune »

La peinture chez Kandinsky est le fruit d’un long cheminement artistique, d’une profonde réflexion théorique basée sur son expérience personnelle, son ressenti, ses émotions. Théoricien de l’art, dans son premier grand ouvrage intitulé « Du spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier » (1910), il expose sa vision et évoque les responsabilités de l’artiste :

« Une œuvre d’art n’est pas un phénomène fortuit qui apparaît indifféremment ici ou là », « mais un être vivant obéissant à une nécessité spirituelle ». « Est beau ce qui procède d’une nécessité intérieure de l’âme ».
« La peinture est un art, et l’art dans son ensemble n’est pas une vaine création d’objets qui se perdent dans la vie, mais une puissance qui a un but et doit servir à l’évolution et à l’affinement de l’âme humaine, au mouvement du Triangle. Il est le langage qui parle à l’âme, dans la forme qui lui est propre, de choses qui sont le pain quotidien de l’âme et qu’elle ne peut recevoir que sous cette forme ».

À propos de Esquisse 2 pour Composition VII il explique :

« cette capacité rendant possible la restitution des expériences infinies du vécu spirituel dans les choses matérielles et abstraites ».

Vassily Kandinsky - Esquisse 2 pour composition VII - 1913

Vassily Kandinsky – Esquisse 2 pour composition VII – 1913

En 1922 il est invité par le Bauhaus, école d’architecture et d’art novateur, (Allemagne) pour enseigner la peinture murale. Il y retrouve son ami Paul Klee. Il va pouvoir y développer sa théorie des couleurs en y intégrant de nouveaux éléments comme la psychologie de la forme. Ces travaux conduisent à la publication de son second grand ouvrage théorique « Point et ligne sur plan » (1926).

 (suite)