« Dumm » ! Absurdité du monde.

« Dumm » ! Absurdité du monde

 

Un homme diminué, disloqué, invalide est réduit à mendier. Un riche passant mutilé et hautain, se déplace, lui, sur une planche à roulettes. Deux personnages qui se croisent sans se regarder, deux classes sociales, deux mondes.

Une petite fille seule et pieds nus dessine à la craie sur un mur. Une orpheline sans doute, qui erre, dans une indifférence générale.

Des vitrines présentent des accessoires de beauté d’un côté, des prothèses de l’autre… La futilité des apparences face à la souffrance des mutilés.

Mélange de passants soucieux d’élégance et de personnes à jamais handicapées dont on voudrait oublier l’existence. L’horreur est devenu le spectacle banal et quotidien de la rue…

Sur un tract, on peut lire « Juden raus ! » (dehors les juifs). Sur le mur situé entre les deux vitrines, un mot griffonné « Dumm » (idiot, stupide). L’absurdité de ce monde indifférent à la souffrance, à l’absence de solidarité, à la montée du nationalisme, où des partis d’extrême-droite se forment.

La scène que dépeint Otto Dix est cadrée serrée, oblique, ce qui crée une impression de confusion, de déséquilibre. Les éléments sont nombreux, enchevêtrés, à l’image de la folie du monde, à l’humanité disloquée.

Du bout de son pinceau, Otto Dix témoigne de ce qu’il voit, de ce qu’il vit dans les rue de Prague au lendemain de la première guerre mondiale. Le traumatisme, l’acceptation de l’horreur, la déshumanisation de l’autre, à cause de ses handicaps ou de sa « race ». Il met à nu ce que les historiens considèreront plus tard comme une des racines du nazisme.

Otto Dix est arrêté et incarcéré par les nazis à Dresde car considéré comme un artiste dégénéré.

C’était « La rue de Prague » en 1920. La nuit tombait, il faisait froid, la bête rôdait.

La nuit tombe, il fait froid, la bête rôde toujours…